Arequipa, la cité blanche

Nous rejoignons le terminal de bus pour nous rendre de Puno à Arequipa. En chemin, je prends quelques abricots au marché pour la route, pas plus, car nous comptons sur les vendeurs ambulants pour nous mettre quelque chose sous la dent pendant le trajet. Malheureusement pour nous un contrôle en plein milieu de nulle part digne d’une frontière nous obligera à abandonner ces abricots si durement négociés. Autre petite galère : le bus n’a plus de puissance, nous roulons à 10 km/h en montée, et en descente il est en roue libre en essayant d’optimiser sa vitesse. Cela impatiente un bus derrière nous qui tenta un dépassement en force mais l’accident n’était pas loin. On pourra noter également un père qui fait pisser son gamin contre la porte du bus qui roule, normal. Bilan des courses, 8 heures de bus au lieu de 5.

Arequipa se situe à 2335m d’altitude et la température est parfaitement agréable : chaud la journée mais pas suffocant, frais la nuit, juste ce qu’il faut pour dormir. Nous logeons dans le centre-ville, à côté du couvent Santa Catalina. L’hôtel possède une terrasse que nous testerons dès le lendemain matin pour y prendre un petit-déjeuner.

Nous nous rendons à un premier musée dédié à Juanita, petite fille inca sacrifiée il y a plus de 500 ans et retrouvée momifiée en 1995. Sélectionnés pour leur appartenance à une certaine caste, les enfants « élus » étaient élevés et vivaient en sachant qu’ils allaient être enterrés en haut d’une montagne, à plus de 6800m d’altitude. Imaginons juste l’époque à laquelle l’action se passe : il n’y a ni chaussures à crampons, ni sac à dos Quechua, ni fibre synthétique ultra performante ! Un groupe de personnes entreprend un périple de plusieurs centaines de kilomètres et grimpe par des températures glaciales au sommet pour réaliser des rites religieux, tuer l’enfant, l’enterrer, puis tout le monde redescend. Le corps, piégé par le froid, a été conservé pendant des centaines d’années, puis est réapparu, à la faveur du déplacement du sol dû à l’éruption d’un volcan proche, et au soleil fondant les glaces. Le clou de la visite du musée est le corps de Juanita, conservé dans un caisson à -20°C, dans un parfait état de conservation.

                                                                        (Photo issue d’internet ; les photos étaient interdites dans le musée)

La faim approche : direction le mercado pour encore une fois profiter d’un délicieux ceviche, poisson cru mariné avec du citron et de l’oignon. Nous accompagnerons tout ça de chicha morada, boisson sans alcool préparée à partir de maïs violet, l’une des nombreuses variétés de maïs que l’on peut trouver ici (à ne pas confondre avec la chicha, boisson des incas fabriquée à partir de maïs fermenté, et donc alcoolisée).

L’après-midi nous nous rendons au fameux couvent Santa Catalina. Fondé en 1579, il accueillait environ 450 religieuses. Les familles espagnoles fortunées y envoyaient leur cadette dès 12 ans (pour le noviciat). Elles devenaient nonnes à 16 ans contre le paiement d’une dot (qui correspondrait à 56 000 US$ aujourd’hui). La vie ne semblait pas désagréable. Elles vivaient dans le luxe (avec servantes ou esclaves) dans des maisons confortables. Elles se confessaient une fois par semaine. Quand elles mourraient, elles étaient enterrées au sein du couvent, elles ne le quittaient jamais une fois leur entrée à 12 ans.

A cette époque, pour ne pas dilapider l’argent, le premier homme de la fratrie fonde une famille et récupère l’héritage, le deuxième enfant entre dans les ordres (question d’honneur), et les suivants à l’armée (grandes chances de se faire tuer), et les autres on ne sait plus ce que raconte l’histoire. Visite guidée très intéressante conduite par une guide francophone (une Péruvienne avec un accent français impeccable).

Le marché n’étant pas très loin, nous y retournons pour aller du côté des fruits frais. Le jus de maracuya est notamment délicieux, Albane et Sophia en redemandent !

Après quelques emplettes (Albane part bientôt malheureusement), nous recherchons le restaurant mexicain dans lequel les filles ont mangé hier. C’est petit et convivial, et l’assiette n’est pas mauvaise. Cela nous change un peu des menus riz-patates du soir. Il n’y a pas tellement d’intermédiaire au Pérou pour les restaurants dans cette ville. Soit vous prenez un menu à moins de 2€ mais la soupe de quinoa est quasi obligatoire, soit vous optez pour la polleria (resto rapide de poulet grillé), c’est un peu gras mais c’est bon, soit vous allez dans le restaurant pour touristes fortunés où les prix sont européens. Le mexicain est une bonne alternative.

Le soir, Albane négocie une poupée avec une cholita sur la place centrale à la pleine lune. Je ne sais pas si toutes ces conditions réunies influent sur la négociation, mais je pense que Daphné sera contente.

Le lendemain nous arpentons la ville avec nos points de repère : le marché avec ses jus de fruits frais et son ceviché, la place centrale.

Albane décolle demain en début d’après-midi pour rejoindre Lima avant de repartir sur Paris, puis Lyon. Nous faisons de derniers achats, et nous entreprenons de tout faire rentrer dans son gros sac. On a déjà fait le coup à tout ceux qui sont venus nous voir, on n’a jamais perdu une occasion de profiter de leur dos pour nous ramener quelques affaires. Après avoir bien tout comprimé (les pelotes de laine se tassent bien quand même), puis sorti le duvet pour l’accrocher sous le sac à dos, tout est rentré, y’avait plus de place. Résultat des comptes : 19,55 kg tout de même. Merci encore pour le prêt du dos !

On se décide à faire un resto/bar pour le dernier soir. Ils ne servent pas de nourriture le soir en fait, nous nous rabattons sur 3 cocktails, en laissant l’heure tourner.

En sortant, il est déjà 21h, et la seule option que l’on connaisse, c’est… le mexicain. C’est parti, on est fous, on essaie même le Inca Kola depuis le temps qu’on le voit de partout et que tout le monde en boit. On n’a pas compris son succès.

En bonne accro aux avocats qu’elle est, Albane décide d’en ramener quelques-uns dans son sac cabine. Cela nous permet de retourner encore une fois au marché, et d’y prendre, je ne sais plus trop quel jus. Dernières mais vraiment dernières emplettes cette fois, avant de pique-niquer sur la terrasse de l’hôtel. Et puis on prend le taxi pour aller à l’aéroport, ça y est ma sœur nous quitte, non sans émotion.

Cela nous fait bizarre de nous retrouver seuls, personne n’est là pour nous aider à parler espagnol. Nous rentrons en bus à l’hôtel, après avoir baragouiné deux-trois mots pour essayer de savoir si la direction était la bonne. Nous tombons sur un bar où les matchs de Champions League se jouent, je décide de rester un peu voir Lyon jouer. Eh oui, ici les matchs étaient à 5h de l’après-midi, ça change de la finale de l’Euro à 3h du matin.

Les jours suivants nous nous devons d’organiser la suite : où aller, comment y aller ? Je suis un peu fatigué, et depuis le début du voyage nous n’avons pas eu de problème de santé particulier, mais là j’ai besoin d’utiliser les antibiotiques pendant 5 jours. Je vous explique. En arrivant à Agua Calientes, on constate que tous les marchands vendent de l’anti-moustiques. Nous avons laissé les nôtres dans nos gros sacs restés à Cuzco. Pas question d’en racheter, déjà qu’on n’arrive pas à vider un flacon en 6 mois … De toute façon il n’est pas censé y avoir de moustiques à 2000m ! Bizarre …

En fait, le site du Machu Picchu est infesté de mouches des sables, et étant en short, je me suis fait littéralement bouffer. Il m’a été impossible de ne pas gratter pendant la nuit suivante (j’ai une très très faible propension à me retenir de gratter un bouton, chacun ses défauts). En plus de ça, j’ai l’oreille droite brûlée par le soleil. Et tout ça semble commencer à s’infecter, d’où la prise d’antibiotiques. Je ne sais pas si c’est lié, mais la vingtaine de boutons me font aussi mal à la jambe, je ne peux pas marcher très longtemps. Je vous raconte ma vie, mais Sophia, elle, va très bien 🙂 .

Autant vous dire que les deux jours suivants ont été très calmes sur le plan touristique. Nous sommes quand même retournés manger un ou deux cevichés, nous avons testé une polleria et j’ai acheté un livre hors de prix en français, pour le plaisir. (Les Trois Mousquetaires, pour ceux que ça intéresserait).

Je ne sais plus trop à quel moment on s’est décidés pour la prochaine étape, mais le prochain article n’est pas comme les autres. Après être retournés sur Puno, avoir passé la frontière et s’être arrêtés une nuit à Copacabana, nous allons poser nos valises pour deux semaines à Cochabamba, en Bolivie.

Thibault

Thibault

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